Bonjour à tous !
C’est avec excitation, joie, mais aussi appréhension que je partage avec vous ce premier chapitre de ma nouvelle saga, une romance heroic fantasy. Je dois dire que c’est un genre tout nouveau que je vous propose et j’espère que vous me suivrez dans cette nouvelle histoire. J’ai toujours rêvé de créer un univers aussi génial que les romances fantasy que j’ai pu lire en manga. J’espère que c’est chose faite avec » Là où mon coeur te retrouvera… ». J’ai hâte que vous découvriez tout ce petit monde. N’hésitez pas à me dire vos premières impressions en commentaires et à évaluer ci-dessus le chapitre !
Enjoy !
©Jordane Cassidy – 2022
1
Le destin a un nom :
Hélix Mildegarde !
— Allez, ma chérie ! Dépêche-toi ! Nous ne devons surtout pas être en retard pour notre entretien avec le Roi !
Amusée, Aélis regarda son père, Fergus De Middenhall, Baron de Piléa, l’obligeant à accélérer le pas en la tirant par la main. Son père était l’un des conseillers du Roi. Il était sollicité régulièrement par la cour en tant qu’expert architecte, au point d’avoir pu asseoir sa réputation dans son domaine aujourd’hui en partie grâce à lui. Il a été l’homme ayant rénové le château royal d’Avéna lorsque le Roi Hélix Mildegarde a hérité du trône de son père, feu le Roi Angus Mildegarde. Le Roi Hélix Mildegarde a entrepris de grands chantiers pour imposer son image à travers le royaume et effacer l’histoire sombre liée au règne de son père, et c’est ainsi que Fergus fut choisi comme maître d’œuvre.
Travailler pour un roi, c’était soit lui donner satisfaction, soit finir six pieds sous terre. Le droit à l’erreur restait quelque chose que le Roi Mildegarde ne concédait guère. Question d’autorité oblige. Fort heureusement, le père d’Aélis était réellement bon dans son domaine. Il avait pu montrer ses compétences et satisfaire le Roi, année après année. Le royaume devait son image de grandeur en partie grâce aux travaux de son père.
De ces résultats satisfaisants était née une grande confiance du Roi pour lui, teintée néanmoins d’une grande pression pour Fergus De Middenhall.
Aélis sourit en admirant cet homme aguerri face aux frasques du Roi qui s’amusait à le presser de la sorte. Malgré la confiance de Hélix Mildegarde acquise au fur et à mesure des années en répondant à ses souhaits les plus ubuesques, son père restait un homme inquiet. Bien plus inquiet qu’elle ne l’était pour lui ! Même s’il s’agissait du Roi, la relation qui en avait découlé avec lui au fil du temps s’était transformée en une sorte d’amitié retenue. Le Roi n’était plus au stade de le tuer pour dix minutes de retard. Il était évident qu’il verrait cela comme un énorme gâchis s’il perdait un tel architecte pour de telles futilités. Il se trouverait sans nul doute fâché, mais ne tuerait pas pour si peu l’homme qui l’aidait depuis le début à forger sa légende. Son père était une valeur sûre à ses yeux.
Lorsqu’ils arrivèrent à la salle du trône, ils furent tous deux essoufflés, mais soulagés d’être enfin devant lui. La robe d’Aélis lui collait un peu aux jambes ; elle devait avoir la peau moite de transpiration, mais qu’importe ! Il fallait juste sourire et paraître stoïque, mais soumise, devant le Roi. Accoudé sur le rebord de son trône, le menton posé entre ses doigts, Hélix Mildegarde souriait de manière hautaine.
— Vous voilà enfin, Fergus ! fit le Roi tandis que Fergus et Aélis le saluaient d’une révérence. J’étais à deux doigts de quérir une troupe de soldats pour vous extirper de chez vous !
— Veuillez pardonner notre retard, votre Majesté. Notre excuse serait sans nul doute insuffisante pour calmer votre éventuel courroux, mais nous avons fait au mieux pour être ici dans les meilleures dispositions.
Bien obligée de garder la tête baissée, Aélis ne vit pas la réaction du Roi à la réponse de son père, mais sa voix l’impressionnait autant que sa prestance qu’elle sentait s’appesantir sur ses épaules.
— Vous semblez effectivement en peine, entre vos poitrines qui se soulèvent et votre sueur vous faisant scintiller sous les lustres de cette salle.
Des rires retentirent dans la salle où quelques membres de la noblesse s’étaient invités de part et d’autre de l’allée centrale. Aélis entraperçut son père s’incliner davantage pour s’excuser une nouvelle fois de leur piètre arrivée. Que ne fallait-il pas faire pour satisfaire le Roi ? Cela l’agaçait un peu, mais avaient-ils le choix ? Elle réalisa que l’amitié qu’elle pensait avérée entre le Roi et son père était peut-être surévaluée. Son père craignait bien plus les humeurs de cet homme que les réelles fautes qu’il pouvait commettre à son encontre.
Le Roi congédia les nobles d’un signe de main pour entamer une discussion sans doute d’ordre plus privée. Rien qui ne surprit Fergus, habitué à la discrétion lorsqu’il s’agissait de parler de projets pour la grandeur du Royaume d’Avéna.
— Redressez-vous, cher ami ! déclara alors Hélix Mildegarde, tandis qu’il soufflait d’agacement. Si je vous ai conviés aujourd’hui, ce n’est pas pour parler de votre retard ni de nos projets en cours, mais de mon nouveau projet.
Son père se redressa tandis qu’Aélis restait courbée. Ses chevilles lui faisaient un mal de chien, mais le protocole restait le protocole.
— Votre nouveau projet ?
— Effectivement !
— Votre Majesté, il va être difficile de commencer autre chose en sachant tout ce qui est déjà en cours ! Je n’aurais pas assez d’hommes pour…
— Silence ! Cessez de brailler !
Il se leva de son trône et descendit les quelques marches le séparant de Fergus et de sa fille. Il s’avança ensuite vers eux, du moins vers Aélis. Son inquiétude augmentait sa curiosité, mais elle garda sa position tandis qu’il la contournait doucement. Aélis sentait son regard inquisiteur sur elle et bizarrement, cela lui déplaisait, car elle en venait à penser que son nouveau projet la concernait.
— Voici donc votre fille…
Fergus De Middenhall s’empressa de les présenter.
— Voici ma fille, oui. Aélis Jenna De Middenhall.
Tandis que le Roi stoppait sa progression autour d’elle, Aélis put l’entendre émettre un grognement satisfait.
— Quel âge a-t-elle à présent ?
— Dix… Dix-huit ans…
— Ne serait-il pas bon ton de penser à la marier ? Elle a plus que l’âge,
non ?
Les yeux d’Aélis s’écarquillèrent. Les voilà repartis dans les discussions de nobles sur la bonne vieille tradition de se donner au premier aristocrate qui pourrait améliorer les réputations de chaque famille.
— Nous y songeons, Votre Altesse. Ma femme et moi prenons juste le temps d’offrir à notre fille le meilleur parti qui soit. Vous pouvez comprendre combien un père souhaite voir sa fille heureuse et non affligée par la tristesse. Aélis n’a déjà pas eu une vie facile…
Le Roi émit un nouveau grognement. Était-ce une approbation ou une déconvenue ? Aucun, de son père ou d’elle, ne pouvait le dire. Tout ce qu’ils savaient, c’était que ses demandes restaient suspicieuses et angoissantes.
— Relevez-vous ! ordonna alors le Roi à Aélis. Retirez votre capuche.
Aélis jeta un regard paniqué à son père, qui l’invita à obéir malgré ses réticences. Cette dernière s’exécuta, mais sa gorge se serra et son sourire de convenance se crispa quand elle croisa son regard. Elle put enfin voir le Roi sur toute sa hauteur. Il avait la quarantaine affirmée et faisait deux têtes de plus qu’elle. Une cicatrice sur la joue, des cheveux noirs grisonnants et de grands yeux verts. Sa barbe était impeccable et sa tenue, digne de sa grandeur. Un grand manteau bleu marine aux ornements dorés, une énorme bague à l’annulaire droit et une chevalière au majeur gauche. Sa posture altière et son sourire la glaçaient. Elle ne savait pas quoi penser de lui. Elle pourrait le trouver sympathique, mais elle décelait dans son intérêt pour elle quelque chose qui lui donnait des frissons. Tout en lui indiquait qu’il préparait un coup qui la concernait directement.
— Jolie jeune femme ! commenta-t-il alors tout en relevant son menton de son index et incrustant son regard vert dans celui de la jeune femme. Elle a bien grandi depuis la dernière fois que je l’ai vue. Elle était encore enfant…
Il tourna à nouveau autour d’elle et s’arrêta dans son dos.
— Elle a les magnifiques cheveux argentés de sa mère… Quel dommage de les cacher !
— Vous savez bien que ce qui est différent de la norme demeure suspicieux aux yeux de beaucoup… lui murmura Fergus.
Hélix Mildegarde considéra les propos de son architecte avec intérêt et remarqua la tristesse sous-jacente dans sa voix. Il toucha alors la pointe de sa chevelure furtivement. Aélis se raidit devant ce geste gênant. S’il y avait bien un sujet sur lequel elle restait tendue, c’était bien la particularité de sa chevelure.
— Chevelure toujours aussi fascinante ! Comment va Christa ?
Aélis s’étonna d’autant de familiarité en écoutant le Roi Mildegarde citer sa mère par son prénom. Son père ne sembla pas s’en offusquer. En même temps, le Roi restait le Roi. Que pouvait-il dire sur ce point de politesse ?
— Elle va bien, je vous en remercie. Elle vous passe le bonjour. Pour revenir à votre projet, Votre Grandeur…, l’interrompit son père dans sa contemplation, je vous écoute.
Le Roi lâcha un « hum » grognon et tourna autour d’eux en silence, les mains derrière son dos.
— Fergus, vous êtes à mon service depuis un moment maintenant…
— Oui, Votre Excellence.
Son père inclina légèrement sa tête. L’attente que laissait planer le Roi sur son projet était insupportable, mais ils ne pouvaient que se plier à ses humeurs. Encore et toujours.
— Que souhaitez-vous que je construise pour vous ?
— Un avenir ! répond-il alors très rapidement, ce qui interloqua son père.
— Votre avenir vous inquiète encore ? osa l’interroger Fergus.
Le Roi s’arrêta devant eux et fixa Aélis.
— Il ne s’agit pas de mon avenir… Je suis à un stade où j’ai construit plus qu’il n’en faut et si ma vie devait s’arrêter aujourd’hui, je n’aurais aucune forme de regret. J’ai un royaume prospère, une réputation connue à travers toutes les contrées, une famille avec un héritier…
Il reprend sa marche, songeur.
— Il s’agit de l’avenir de quelqu’un qui pourrait ne jamais connaître l’avenir dont je jouis actuellement…
— Le futur de votre fils vous inquiète ? répondit Fergus. Son avenir est pourtant tout tracé.
Le Roi s’arrêta à nouveau et lança un regard dur au père d’Aélis.
— Mon fils ? Tsss ! Malgré sa jeunesse, je reste conscient des capacités de chacun. Qui pourrait dire quel avenir mon fils vivra ? Je ne veux pas écouter les oracles. Le trône lui est certes destiné, mais la descendance, le sang, ne font pas pour autant un bon roi dès sa naissance. Il doit gagner son avenir. Pour l’heure, il n’est pas prêt à endosser une telle responsabilité.
— Il n’a que quinze ans ! relativisa Fergus. Il a encore le temps de faire ses preuves…
Le Roi regarda vers les fenêtres du château, l’air pensif.
— Le temps… quelle notion absurde dans notre monde. Tout peut arriver du jour au lendemain… Nous savons tous les deux combien des populations peuvent disparaître en un claquement de doigts ou bien vivre selon le bon vouloir d’une personne. Qui sait si mon fils sera celui qui claquera ses doigts ou celui qu’on exécutera d’un claquement de doigts ? Il faut avant tout avoir un tempérament de leader et mon fils a beaucoup de travail à faire à ce niveau-là… Non, je ne pense pas à lui. Effectivement, même s’il a l’âge de certaines choses, il n’est pas prêt à tout.
— Qui pourrait jouir de votre exemplarité si ce n’est votre héritier dans ce cas, si je puis me permettre ?
Le Roi regarda Aélis une nouvelle fois.
— Il y a une personne proche de moi qui a besoin de votre aide pour se construire autrement de ce qu’il est actuellement. Vous construisez les plus belles choses de ce royaume ; il est donc logique que je vous sollicite ! Il refuse mon aide. En soi, il n’a jamais attendu après personne pour survivre. Cela peut se comprendre que mon intervention l’agace. Pourtant, il est à un stade où il lui faut évoluer autrement pour prendre vraiment sa place dans ce royaume.
— Que souhaitez-vous que je construise pour lui, Votre Grandeur ? Une statue ? Un château ?
Le Roi se positionna devant Fergus et le fixa avec sévérité.
— Fergus, vous avez été exemplaire jusqu’à présent. J’ai toujours pensé que vous aviez un caractère droit, fidèle, altruiste et ne fléchissant pas devant l’impossible. Vous me l’avez prouvé à maintes reprises. Christa est des plus apaisées et protégées grâce à vous. Mes demandes fantasques, vous les avez toujours réalisées et je ne doute pas aujourd’hui que vous y répondiez une nouvelle fois favorablement.
Le Roi se tut quelques secondes, le temps de jauger les réactions perdues du père d’Aélis, avant de reprendre.
— Votre rigueur, vous l’avez sur tous les pans de votre vie.
— Je fais de mon mieux, votre Splendeur.
Le Roi se mit à sourire.
— Plus vous me flattez avec vos différentes appellations, plus je pense pouvoir tout vous demander, vous le savez ?
La remarque du Roi laissa son père perplexe.
— J’ai besoin de la plus belle de vos fabrications : votre fille, Aélis.
— Quoi ? firent les De Middenhall en chœur.
Le Roi fixa alors Aélis.
— Fergus, votre fille est votre sang, je l’entends ! Je sais qu’elle est un trésor à sauvegarder et je pense qu’elle le sera d’autant plus, après ma réflexion sur le sujet. Je sais aussi qu’elle a reçu l’éducation qu’il faut pour la personne que je souhaite aider.
— Ma fille… répéta Fergus, estomaqué par la possibilité de l’embrigader dans les projets du Roi. Qu’attendez-vous d’elle exactement ?
Hélix Mildegarde sourit à son fidèle serviteur.
— Elle sera parfaite comme épouse.
Le cœur d’Aélis se serra. La panique s’installa en elle. Elle voyait son père écarquiller les yeux sans pouvoir trouver à redire. On parlait du Roi. Qui pouvait refuser quoi que ce soit émanant de lui ? Elle se sentit blêmir et faiblir devant l’aura monstrueuse du Roi qui la contemplait tel un juge l’envoyant à la guillotine. Le Roi souhaitait la marier à quelqu’un. Il lui imposait un mari, une vie qu’elle ne pouvait choisir. Son annonce la foudroya. Elle sentit disparaître en elle son innocence à croire qu’elle pouvait rester maître de son destin.
— À… qui voulez-vous la marier ? demanda alors son père d’une voix éteinte.
— À mon fidèle bras droit. Celui avec qui je partage le plus de victoires et de satisfaction : le Duc Callum Callistar.
Les jambes de la jeune femme faiblirent et elle s’écroula au sol. Le couperet était tombé et elle était morte. Littéralement. On pouvait la confier à un vieux, un pervers, un avare, mais la voilà envoyée dans les bras de l’homme le plus violent du royaume, le plus sanguinaire au point qu’on l’appelait le Chevalier de Sang d’Althéa : Callum A. Callistar. Les larmes quittèrent ses yeux pour couler sur ses joues. Aujourd’hui, elle avait appris l’annonce la plus funeste la concernant.